Tous ceux que la Ligne des Cévennes attire !

Exposition de Jack Solle à La Grand Combe

La fascination qu’exerce notre Ligne des Cévennes et son train Cévenol n’attire pas que les cheminots et les historiens.

Le Comité a rencontré, depuis 20 ans, ses très nombreux et nombreuses amoureux et amoureuses. Il leur a donné la preuve d’un attachement indéfectible à l’œuvre des bâtisseurs physiques et de ceux qui politiquement ont voulu mailler le territoire national.

Il a aussi loué tous ceux qui, aujourd’hui, remettent le « train sur ses rails » !

Et il est heureux de les rencontrer, souvent et partout, au téléphone, « en ligne », au hasard de réunions politiques, aux détours de manifestations…

Aujourd’hui, c’est le jeune photographe, Jack Solle, que nous avons accompagné le long d’une bien belle « ligne de vie ». On vous le confie et on vous invite à voir son exposition et son travail à la DETER, à La Grand-Combe. C’est sur le pont, au-dessus de la voie ferrée.

Contact : contact@ladeter.org

Cévenol.e.s

par Jack Solle

À la question de la pérennité : comment représenter le monde et pourquoi ?

Les Cévenols et Cévenoles répondent à l’unisson par le mouvement incessant de leur résistance pour préserver l’épine dorsale d’un pays tout entier, une ligne de train à l’élan quasi-mystique traversant une terre de contradictions singulièrement ancrée dans sa contemporanéité.

Le Cévenol, c’est ce mythe prenant son origine dans une ligne ferroviaire autrefois en avance sur son temps, et qui mêle aujourd’hui souvenirs, vestiges et autres regrets d’une époque où le wagon était un espace créateur de lien social.

Finalement, il importe peu que sa fréquentation soit à la baisse, c’est l’idée même de lutte qu’il convient ici d’entretenir. Une lutte pour la défense des services publics et contre le tout-TGV dont s’échappent les réminiscences de rebellions plus anciennes, des grèves de cheminots et de mineurs aux combats menés par les maquisards et camisards.

Les Cévenols et Cévenoles n’oublient pas. Ils se souviennent et transmettent cet héritage dans leurs mobilisations d’où flotte un parfum libertaire unique aux accents utopiques saupoudré d’un climat révolutionnaire de fin des privilèges, écho d’une recherche du sens du collectif qui semble parfois refleurir ici et là.

Dans ce récit, où me situé-je ? Partout et nulle part à la fois.

L’exploration de mon histoire familiale traverse ce legs de manière presque accidentelle, au détour d’une offre à 1 euro de la SNCF il y a deux ans qui me donne l’occasion de prendre place à bord du TER actuel et de commencer une auscultation photographique des lieux qu’il dessert. De Nîmes, ma ville natale, à Langogne, gare la plus proche d’Auroux, village de l’Aubrac où sont enterrés mes arrières-grands-parents, c’est une multitude de ponts, viaducs et tunnels qui se succèdent devant mes yeux dans des décors majestueux desquels me parvient l’écho de multiples histoires.

Ces histoires, c’est notamment celle de ma grand-mère Betty, 93 ans, qui me confie au détour d’une conversation une jolie boîte en carton contenants les traces chèrement gardées d’une vie grandement passée auprès de son mari aujourd’hui disparu, mon grand-père Robert, par ailleurs conducteur de train durant de nombreuses années.

C’est aussi celle d’André, cévenol d’adoption et fer de lance de la lutte pour le maintien de la ligne avec lequel je me suis longuement entretenu. Ou encore celle de Julian, chef de gare à Villefort parti depuis à la retraite et collectionneur de coiffes

ferroviaires. C’est enfin celle de tous ces inconnus qui ont fait des Cévennes ce qu’elles sont aujourd’hui, des terres que l’on dit loin de tout et pourtant si proches, autant éloignées du bruit du monde que situées en son exact centre.

Ici, au sein d’un bâtiment surplombant la voie ferrée, ces récits se dévoilent au rythme du rail, le long d’une carte évoquant la géographie spatiale, sociale et temporelle d’un pays de la solitude et de la solidarité. En hommage à la poussière des villages d’antan venue des houillères, les images imprimées en mille nuances de gris viennent tour à tour se superposer et s’entremêler, liées par des fils rouges comme autant de souvenirs reconstruits.

S’opère ainsi un travail d’appropriation servant le déroulé d’un voyage intérieur qui perçoit sa spécificité dans la construction de l’expérience collective et d’une certaine réalité, appuyée par la forme de l’enquête documentée venant étreindre l’idée de fable et la divulguant à la marge, par petites touches, comme autant d’interstices d’où s’échappe la fiction, tel que ce montage imprégnant la gare de la Grand-Combe de la communion de ma grand-mère, dans un geste visant à interroger la fidélité des récits qui arrivent jusqu’à nous et que nous transmettons. Travail de mémoire ? Probablement. Document historique ? À vous d’en juger.

À la question de la pérennité : comment représenter le monde et pourquoi ?

Les Cévenols et Cévenoles répondent à l’unisson : légende.

Jack Solle

Voir aussi sur ce blog :

• Le blog : mode d'emploi

• Service départemental d'incendie et de secours.

• Service public de l'eau.

• SNCF et Ligne des Cévennes.

• Territoires et politiques intercommunales.

• Trésor public

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